Je suis assez d'accord Serge.
Je ne saurais dire si l'on est passés (jusqu'à présent) à côté d'un 1962/1963, mais il va de soi que le réchauffement ne va pas dans le sens d'une sauvegarde de l'intensité des vagues de froid d'antan. En disant cela, il n'est cependant pas question d'ignorer le caractère parfaitement remarquable de cet hiver 2009/2010, au moins à l'échelle franco-française.
J'aurais tendance à penser - subjectivement dans la mesure ou cela ne repose pas sur des modélisations ou des expériences concrètes - que le réchauffement global serait de nature à favoriser une certaine augmentation des périodes froides hivernales sur l'Europe Occidentale, tout en diminuant l'intensité moyenne de ces périodes froides par rapport à ce que l'on avait par exemple dans les années 60. Pour schématiser, plus de périodes froides que lors des années 1980/1990, mais plus non plus de phénomènes extrêmes comme par exemple l'hiver 1962/1963. Pourquoi ?
D'une part, parce que le réchauffement a tendance à mettre à mal la circulation zonale si puissante que l'on a beaucoup connu notamment dans les années 1990. Le vortex arctique semble avoir tendance à s'affaiblir au fil des années, et les remontées douces parviennent bien plus régulièrement à générer des blocages au flux océanique. Selon les cas de figure, soit le vortex est encore suffisamment actif pour au moins limiter ces remontées (auquel cas, le plus souvent, les hautes pressions s'effondrent sur nous et on a au moins du froid radiatif), soit il ne l'est pas et des blocages durables se mettent en place a des plus hautes latitudes, sans que les bas géopotentiels n'aient les moyens de les déloger. Regardez n'importe quel run de modèle ce soir : blocage modeste au niveau de l'Islande (au sens qu'il n'est pas si puissant par rapport à ce que l'on a pu voir), mais les bas géopotentiels arctiques sont si faibles qu'ils n'ont aucune influence sur lui et qu'il semble pouvoir rester aussi longtemps qu'il le voudra. Pour faire une petite passerelle, pas étonnant dans cette situation que l'anomalie mondiale troposphérique (donc à environ 4,5 km d'altitude) flirte avec les records !
Dans cette optique, j'aurais tendance à penser que ce sont donc les hivers du type 2006/2007, qui étaient synoptiquement parlant la norme des années 1990, devraient au contraire devenir des hivers plus rares, quand ce sont des hivers type 2008/2009 qui pourraient devenir les plus courants.
Après, concernant l'intensité des vagues de froid auxquelles nous devrions être plus souvent soumis, elle devrait avoir tendance en moyenne à décroître légèrement, sans empêcher des périodes ponctuellement remarquables. Ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'il ne fera jamais 15° en janvier à Strasbourg avec flux d'est (ou du moins pas avant que le Treize ne soit devenu trop gateux pour taper sur un clavier). Ce n'est pas cela le réchauffement. Le réchauffement, c'est seulement le fait que là où il avait fait par exemple -12° avec telle situation en 1950, avec la même situation aujourd'hui il ne fait que -11.4°. La différence ne semble pas fondamentale, mais 0.6° à l'échelle d'un mois, c'est la différence entre le remarquable mais non exceptionnel janvier 2010, et un mois de janvier qui aurait pu rentrer dans le top 5 des mois de janvier les plus froids depuis 60 ans.
Rétrospectivement, si l'on regarde les 6 dernières années, on retrouve 4 hivers déficitaires en températures, mais sans vague de froid généralisée de grande intensité.
Cette hypothèse basée sur un apport assez "faible" de conditions arctiques (par exemple ligne 510 qui n'a que frôlé le nord-est du pays en décembre) et une prédominance de plus en plus prégnante de flux "regonflés" de la ceinture tropicale (non avéré cet hiver c'est vrai), pourrait-elle expliquer ces printemps chauds précoces de cette dernière décennie ainsi que ses automnes encore trop chauds
D'une certaine manière je réponds à ta phrase : j'ai donc tendance à penser (c'est seulement une pensée, je me garderais bien de prétendre que je détiens la lumière !) que la prédominance des flux doux d'origine subtropicale est au contraire appelée à se réduire au fil des prochaines décennies en France et en hiver. Et c'est toute la différence avec les trois autres périodes de l'année, où d'une part les périodes de blocages anticycloniques ne sont plus forcément gages de températures fraiches (Juillet 2006 : le mois de juillet le plus chaud jamais observé en France, grâce à un blocage durable sur Albion apportant flux d'est chaud et sec), et où d'autre part les apports de gouttes froides par le N et le NE sont beaucoup plus rares.
Tiens, c'est le moment de reprendre cette idée, et d'aller jeter un oeil un peu plus haut dans le topic sur ce graphique que j'ai posté avec l'évolution des normes entre 1971-2000 et 1981-2010.
Avec une nouvelle décennie d'observations, on constate un net réchauffement des printemps, des étés et des automnes, mais une relative stagnation des hivers.
Allez, peut-être que je me trompe complètement, qu'on finira 2010 avec une anomalie de -1.9° avant un hiver 2010-2011 à -7.9°
C'est la complexité du problème qui permet des hypothèses, car si on y inclut le fait d'un réchauffement "normal" multi décennal, les ambiguïtés et forçages thermiques prochain, s'ils s'avèrent exacts, devront peut-être s'affranchir d'une explication en termes de "variabilités" et ...malheureusement trouver des explications anthropiques.
A ce niveau, c'est à chacun de se faire son opinion, le tout étant d'essayer de prendre les choses avec un maximum d'objectivité et de recul. J'ai fait mon opinion après plusieurs années d'observation, mais je ne suis pas la pour l'imposer à qui que ce soit. Je viens juste pour échanger avec vous des observations, des comparaisons, quelques réflexions, mais pas pour imposer des points de vue. Je sais, cela doit faire bizarre de lire cela Serge et Michel de l'un de ceux que l'on a du longtemps vous décrire comme l'un des cerveaux du grand satan (lol), mais je ne perds pas espoir qu'un jour ceux qui vont servi ce plat comprendront qu'ils ne se sont pas fait jeter pour leurs idées, mais pour la manière dont ils voulaient les imposer en refusant tout débat.